DANS LE RÉTRO. Paris-Plages : en juillet 2002, le sable envahit la capitale

Le 21 juillet 2002, un demi-million de personnes découvraient la première édition de Paris-Plages, lancée par le maire de la capitale Bertrand Delanoé. Quatorze ans plus tard, l'opération est devenue une véritable institution. 

    « La plage à Paris ! » Cette exclamation lancée en une du « Parisien » le 21 juillet 2002, cerne bien la nouveauté que constitue l'opération Paris-Plages initiée par le maire de la capitale Bertrand Delanoë. Du sable et des palmiers sur les berges de la Seine fermées à la circulation ? De mémoire de Parisien, on n'a jamais vu ça ! Le projet doit profiter à ceux qui ne partent pas en vacances, mais aussi aux touristes. Dès la fin du mois de juin, la première édition de Paris-Plages est mentionnée dans de nombreux médias internationaux. Pour le maire de Paris, l'opération de communication est déjà réussie. Il ne reste plus qu'à séduire les usagers pendant l'été.

    « L'an dernier, l'opération Berges piétonnes, insuffisamment préparée, avait provoqué des embouteillages monstres et s'était soldée par un semi-échec. » Dans son guide pratique dédié à l'ouverture de Paris-Plages, « Le Parisien » assure que la municipalité a « retenu la leçon ». Celle ci s'attaque désormais à trois défis : un succès populaire, une circulation fluidifiée et un enjeu politique de reconquête piétonne des rives de la Seine.

    «Un rêve», ou même «un délire». Le projet de Bertrand Delanoë, dont le budget s'élève pour cette première édition à 1,5 million d'euros, n'a pas reçu d'opposition au conseil de Paris. Les élus, «probablement curieux du résultat» selon « Le Parisien », ont préféré s'abstenir lors du vote du projet. La «machine» Paris-Plages s'est mise en route un an avant son ouverture, pas moins de 17 services municipaux se sont coordonnés. «Les plagistes prennent le relais» dès le dimanche 21 juillet, termine le journal.

    Dès 2002, les bases de l'opération qui feront son succès sont posées : animations sportives et ludiques, musique, ateliers et espaces de détente sont mis à disposition des touristes et des Parisiens. Une double page pratique, en couleur, donne un premier aperçu de Paris-Plages. Mais attention : il sera impossible de se baigner dans le fleuve, prévient le journal. Bertrand Delanoë, pour «répondre à l'attente pressante des baigneurs», promet à l'époque de créer deux piscines sur la Seine avant 2006.

    «Une image de Paris plus ouverte, plus dynamique, plus attirante». Le lundi 22 juillet 2002, Bertrand Delanoë explique qu'il veut donner la priorité aux «Parisiens qui ne partent pas en vacances» en créant ce lieu de détente sur les quais de la Seine. Concerts, jeux, animations, le projet est culturel mais occupe une place de choix dans le programme écologique du nouveau maire de la capitale, élu en 2001, qui promet un accès facilité aux transports en communs et aux cyclistes.

    L'opération est un succès. 500 000 personnes viennent découvrir Paris-Plages pour la première journée. «La ruée» titre l'édition du « Parisien », qui ne manque pas de rappeler que le vrai test arrive au second jour de l'opération, avec de potentiels problèmes de circulation. Denis Baupin, alors adjoint chargé de la circulation auprès de Bertrand Delanoë, conseille aux Franciliens de prendre les « transports en commun » ou le vélo. Et il annonce une extension probable du projet aux deux berges dès l'année suivante. « L'exiguïté des bancs de sable, qui oblige les touristes à se serrer les uns contre les autres » semble être le seul point noir à une première journée ensoleillée. Russ, touriste américain interrogé ce jour-là, qualifiera même Paris-Plages de « very good idea ».

    Quatre semaines plus tard, « une magie s'est produite ». Christophe Girard, adjoint chargé de la culture pour la Ville de Paris, fait un excellent bilan de cette première opération Paris-Plages. Une nouvelle édition l'année suivante est d'ores et déjà confirmée. Sans extension dans le temps, mais sur une portion de berge plus importante.

    Les palmiers seront replantés dans le Bois de Vincennes, les serres d'Auteuil et dans le Marais. Le sable, lui, va servir aux sablages des chaussées de Paris pendant l'hiver. En 2002, même le bilan de circulation est positif, mais pas question d'aborder la fermeture définitive des voies sur berges « avant 10 ou 15 ans », selon Denis Baupin.

    Chez les touristes, nombreux lors de cette première opération, on en demande plus ! Des points d'eau pour se rafraîchir, plus de transats et de sable. Mais la propreté du lieu, elle, a bien été remarquée.

    Quatorze ans plus tard, le sable envahit de nouveau la capitale mais à trois endroits différents : les berges de Seine toujours, mais aussi le bassin de la Villette et le parvis de l'Hôtel de Ville. Et si la Ville de Paris peut se féliciter d'une fréquentation importante - plus de 4 millions de plagistes en 2015 -, la Cour Régionale des comptes d'Ile-de-France n'a pas manqué d'épingler le dispositif, dans un rapport publié à la  fin de l'année 2015. Gestion irrégulière des partenariats, coûts réels sous-estimés, les griefs de l'autorité de surveillance sont nombreux. Mais cet accroc ne devrait pas entacher le succès populaire de l'opération, chaque année au rendez-vous.